Saint-Benoît-en-Woëvre
Histoire
Au début du 12e siècle, les Bénédictins s’intéressent au site de Richarmesnil, mais quittent rapidement ce lieu inhospitalier tout en lui laissant le nom de leur fondateur. Vers 1130, les Cisterciens, venus de l’abbaye de La Crête (fille de Morimond), s’y installent. En 1147, le pape Eugène III, de passage à Verdun, prend Saint-Benoît sous sa protection.
L’abbaye est construite à environ 500 mètres de l’actuel édifice, toute proche d’un étang aménagé par les moines. Le domaine n’a cessé de s’agrandir au cours des siècles.
La guerre de Trente ans cause de graves dégâts à l’abbaye, qui a du mal à s’en remettre. En 1735, Jean-François de Collenel, issu de l’abbaye de Clairefontaine, est nommé abbé de Saint-Benoît. Il entreprend aussitôt un projet grandiose qu’il eut du mal à financer. Cet important édifice, formant cloître fermé par une abbatiale richement décorée, n’a été habité que par une dizaine de moines.
En 1792, les révolutionnaires réquisitionnent ces bâtiments et détruisent l’abbatiale. Les ailes sont revendues à deux propriétaires qui les transforment en château. En 1914, l’armée allemande investit les lieux et en fait un quartier général et un hôpital. En 1918, en partant, des soldats y lancent des obus incendiaires. Laissée à l’abandon pendant un siècle, la façade principale est « sauvée » en 2020 par un fou de patrimoine.
Architecture
La construction de l’abbaye s’est terminée vers 1746. De style néo-classique, elle était composée de 3 ailes de 50 m de long formant cloître fermé par une abbatiale.
Édifiés sur des caves voûtées en berceau, deux niveaux d’habitation étaient surmontés d’un toit d’ardoises percé de quelques lucarnes. Le rez-de-chaussée était éclairé par 16 baies à linteaux délardés* munis de croisées à 16 carreaux, tout comme l’étage qui bénéficiait d’une porte-fenêtre sur balcon en fer forgé. Le cloître était ouvert par des baies en plein cintre munies également de croisées à petits bois, à l’étage des ouvertures à linteaux délardés (soit environ 200 ouvertures).
L’intérieur, sous voûtes d’arête au rez-de-chaussée décorées de staff et de stuc, avait fière allure. Deux escaliers majestueux desservaient l’étage.
L’abbatiale, de 148 pieds de long, était éclairée par huit hautes verrières. L’intérieur était pavé de carreaux noirs et jaspés.
La cour d’honneur fermée par une grille, est précédée de deux petits pavillons est encadrée par les bâtiments de service : écuries voûtées sur piliers, granges, pigeonniers.
La travée centrale
La travée centrale de la façade est marquée par une porte à linteau droit encadrée de deux colonnes corinthiennes qui supportent un entablement orné d’une frise de rinceaux sculptés. Il supporte lui-même un balcon sur lequel s’ouvre une baie en plein cintre entre des pilastres d’ordre corinthien, dans la continuité du premier niveau. La clef de l’arc porte la date de 1742 qui marque probablement l’achèvement de cette partie. Au-dessus, le fronton cintré accueillait les armes de l’abbaye, martelées à la Révolution. L’ensemble constitue une parfaite illustration d’architecture à l’ordonnance classique.
Les étangs
Le site de Saint-Benoît n’était que marécages avant l’arrivée de moines. Ceux-ci ont drainé ces marécages et ont créé de nombreux étangs où ils trouvaient la base de leur nourriture : le poisson. Un premier étang a été mis en eau tout près de l’ancienne abbaye. D’autres ont été créés aux alentours, dont celui de Lachaussée où le comte de Bar, Thiebaut II, tentait en 1268 de prendre les moines de vitesse en créant un autre étang sur ce site.
Il s’en est suivi une bataille judiciaire entre les moines de Saint-Benoît et le comte de Bar qui a duré jusqu’en 1285, date à laquelle les moines signent la charte dans laquelle le comte de Bar achève d’équilibrer, par de nouvelles concessions, les avantages territoriaux qu’ils avaient obtenus en 1284, pour compléter l’achèvement de l’étang de Lachaussée.
* délardé : aminci grossièrement.
Textes rédigés par Georges Duménil