Notre-Dame de l’Étanche
Histoire
L’Étanche est fondée vers 1140 sur des terres données par des seigneurs locaux, Bertauld Leloup de Faverolles et son neveu, par la volonté de l’évêque de Verdun Adalbéron de Chiny. La date de fondation est incertaine car il n’existe aucun acte. L’abbaye devait être double à l’origine, ce qui n’a pas laissé de traces autres que dans la tradition orale. L’abbaye alterne entre richesse et misère. Certains abbés ne sont pas appréciés des habitants des environs. De nombreux procès ont été menés pour défendre les intérêts de l’abbaye. Les guerres de l’époque moderne la frappent à plusieurs reprises et forcent les religieux à s’exiler dans les bois. L’abbaye de l’Étanche dirige le prieuré de Benoite-Vaux. Son pèlerinage devient relativement célèbre pendant l’époque moderne. À la Révolution, les chanoines sont dispersés, les biens vendus et l’abbaye devient une ferme. Elle change plusieurs fois de propriétaires jusqu’à la Grande Guerre. Elle est alors réquisitionnée par l’armée allemande qui y fait stationner le régiment « K.B. FAR3 ». Sa localisation isolée n’a pas empêché le bombardement de l’abbaye en 1918. Relevée, elle redevient une ferme mais est abandonnée en 1980. Inscrit aux Monuments Historiques en 1985, l’ensemble se dégrade beaucoup.
Architecture
La façade sud du corps de logis, une partie d’un pavillon et l’église de 1770 sont tout ce qui reste de l’abbaye. L’église a connu beaucoup de vandalisme et de vol. Aujourd’hui, l’association conserve à l’intérieur de l’église les différents blocs de pierre qu’elle trouve au gré des opérations de nettoyage. Certains sont ouvragés et laissent deviner les ornements des bâtiments. Les tuiles de différents états de l’abbaye ont également été retrouvées, ainsi que des armes lors de la réfection de la toiture de l’église. Sur la façade, le bas-relief est en mauvais état, abîmé par les conditions climatiques et aussi peut-être par les différents visiteurs, de la Révolution à nos jours. Cependant, le sujet qu’il représente est encore tout à fait devinable, il s’agit de la Vierge nimbée*. La croix qui trônait sur l’église et l’un des pots à feu étaient tombés mais ont aujourd’hui été restaurés. Le logis est en ruines ainsi que le bâtiment dans lequel était la bibliothèque.
Le décor rocaille de la façade de l’église
Le corps de logis n’est que très peu décoré et parait bien austère à côté du style rocaille de l’église. Ce dernier est caractérisé par des décorations exubérantes inspirées de la nature et s’impose sous le règne de Louis XV. Le tympan et l’entablement sur lequel il est dressé sont, à ce titre, remarquables. Le tympan, abîmé, représente un personnage principal et deux plus petits en arrière-plan. Le personnage principal semble sortir de nuages et de halo de lumière. Il s’agit de la Vierge, protectrice de l’abbaye, et d’anges. La croix de l’église a récemment été restaurée (2021). La structure est agrémentée de volutes et de deux pots à feux, éléments illustratifs du style rocaille qui utilise à l’excès les lignes courbes. Il y a dans la façade un trou carré qui abritait à l’origine une horloge.
Restauration de l’abbaye et association
L’abbaye a la chance de posséder une association de bénévoles, Les Amis de Notre-Dame de l’Étanche, qui se mobilise pour la faire connaître et restaurer. Celle-ci a été créée le 30 août 2016 dans le but de « promouvoir la restauration matérielle de l’abbaye, son étude historique et son animation culturelle par des interventions auprès des pouvoirs publics et la collecte de fonds. » Le site, possédé par l’Établissement Public Foncier Grand Est, est géré par le Conservatoire des Espaces Naturels de Lorraine. L’abbaye a été retenue par la mission Stéphane Bern en 2018 et reçoît régulièrement des dons de financeurs publics et privés. L’association, qui est maître d’ouvrage et qui avait réalisé défrichage et déblaiement afin de rendre l’édifice plus accessible dans un premier temps, s’attache désormais à de plus amples travaux pour garantir la conservation et la sécurisation des édifices. Ainsi les voûtes et toutes les corniches de l’église ont-elles été restaurées en 2019. Le remplacement des corniches a été possible grâce à un mécénat populaire. Les travaux du logis, qui constituent la deuxième tranche de financement, ont commencé début 2021, car il menaçait lui aussi de s’effondrer. Il s’agissait d’abord de stopper les dégradations pour sécuriser la zone, ce qui permettrait ainsi de déblayer les pierres tombées pour permettre la reconstruction. Simultanément les travaux de restauration et la remise en place de la croix et des pots à feu, mais aussi de restauration du fronton, ont été menés. L’église bénéficie pour l’instant d’une toiture provisoire en bac acier. Pour la restauration, il a été décidé d’utiliser des pierres de Senonville, dont la carrière est distante de 5 kilomètres environ de l’abbaye, car ce sont celles qui avaient été utilisées à la construction, ou du moins provenaient de la même veine. Des chantiers REMPART, réalisés par des bénévoles internationaux, sont également organisés sur le site. Ils s’attèlent à la reconstruction du mur d’enceinte et ont lieu chaque été.
* nimbée : portant un cercle, disque de lumière que les peintres et les sculpteurs placent, depuis l’Antiquité égyptienne, autour de la tête des personnages sacrés, des héros divinisés, de Dieu ou des saints.
Textes rédigés par Agathe Duchêne