Saint-Paul
Histoire
En 648, l’évêque Paul installe un chapitre de clercs séculiers à l’emplacement d’une église dédiée à Saint-Saturnin. En 971, ces religieux sont remplacés par des moines bénédictins qui donnent le nom de Saint-Paul à cette abbaye destinée à abriter les reliques du sixième évêque de Verdun. Située à l’extérieur des remparts (à l’emplacement du lycée Vauban et du port Saint-Paul), l’abbaye passe aux mains des Prémontrés en 1138. Elle est victime des bourgeois de la ville en colère contre leur évêque qui la détruisent une première fois en 1246. Elle est reconstruite et une église gothique achevée vers 1330 lui est ajoutée. Le roi de France, Henri II, ordonne sa démolition pour des raisons militaires en 1552, mais une nouvelle église est reconstruite intra-muros à partir de 1556. En 1620, l’abbaye adhère à la Congrégation de l’Antique rigueur* pour mettre fin à un certain relâchement dans la vie religieuse. Après un siècle sans travaux du fait des troubles militaires auxquels la Lorraine est en proie, des bâtiments abbatiaux sont élevés par l’architecte lorrain, Thomas Mordillac, entre 1686 et 1698. Le style est sobre et classique. La Révolution survint pendant la construction de la nouvelle abbatiale qui avait été confiée à Claude Mique. Cette église en construction et l’église du 16e siècle sont détruites. Seuls les bâtiments conventuels du 17e siècle sont conservés. Ils ont été vendus ou cédés le 1er Brumaire an XII (24 octobre 1803), par arrêté du préfet. Aujourd’hui, le palais de justice et la sous-préfecture occupent l’édifice.
Architecture
Les bâtiments abbatiaux actuels ont été construits à la fin du 17e siècle par Thomas Mordillac (vers 1550-1560 – 1721) dans un style classique et sobre, associant pierres blanches, briques rouges et ardoises. La façade occidentale donnant sur un parc est entièrement appareillée, tout comme le rez-de-chaussée du cloître. Celui-ci réunit sur trois côtés les locaux du tribunal à ceux de la sous-préfecture. L’abbatiale fermait initialement le carré. L’entrée principale, à laquelle on accède par quelques marches, est placée au centre de l’aile. La travée centrale, à trois niveaux, est couronnée par un fronton cintré accueillant un médaillon noir portant l’inscription latine « Sanctis Paulo apostola et Paulo Virdunensium antistiti » (« dédié à l’apôtre Saint Paul et Saint Paul, évêque de Verdun ») et la date de 1686.
À l’intérieur subsistent des plafonds voûtés d’ogives soutenus par des chapiteaux corinthiens. L’aile occidentale a le mieux conservé son aspect d’origine : elle renferme un immense réfectoire à deux vaisseaux séparés par une file de colonnes centrale, un oratoire voûté, un grand escalier tournant à volées droites et un logement d’hôtes à son extrémité sud.
Le logis abbatial était installé dans l’ancien hospice situé en face de l’aile est et l’actuel hôtel de la Cloche d’Or était la maison où vivaient le procureur de l’abbaye.
La façade occidentale
Uniquement en pierres appareillées, la façade occidentale donne sur un jardin, actuellement délimité par un mur qui le dissimule depuis la rue. À la noblesse du matériau s’ajoute celle de composition qui se traduit par la présence de deux portails constitués par la répétition sur les deux niveaux de pilastres toscans séparés par un entablement et encadrant au rez-de-chaussée une porte surmontée d’un tympan vitré. À l’étage, un fronton triangulaire couronne une grande baie en plein cintre. Long de 65 m, le corps de logis occidental masquait la façade de l’ancienne église abbatiale.
Une ville aux multiples abbayes
Avant 1552, lorsque Verdun constituait l’un des trois évêchés de Lorraine et était rattaché au Saint Empire Romain Germanique, la cité comptait quatorze paroisses et vingt-et-une abbayes.
Les évêques de Verdun ont progressivement bâti ces établissements monastiques à partir du 5e siècle. Cependant la cité fut, à plusieurs reprises, victime des différents conflits qu’elle a subi au fil du temps. Ces abbayes furent, pour certaines, plusieurs fois détruites ou endommagées et reconstruites. Elles représentaient de puissants moteurs économiques pour la ville de Verdun, possédant un patrimoine foncier parfois considérable (moulins, fermes dans les villages détruits…). D’autres bénéficiaient d’un prestige dépassant les frontières de l’évêché (abbaye Saint-Vanne notamment). Tout ceci s’est brutalement arrêté à la Révolution française, durant laquelle les religieux furent chassés.
Outre l’abbaye Saint-Paul, des vestiges de plusieurs autres abbayes sont encore visibles. Sur les hauteurs de la ville (actuelle citadelle haute) subsistent quelques éléments du premier monastère de la ville, fondé en 952 et dédié à Saint-Vanne. Il est encore possible de voir la tour nord de l’ancienne église abbatiale et une série d’arcades du cloître, tandis que la porte de la salle capitulaire est visible dans les jardins du musée de la Princerie (qui possède d’autres éléments de l’abbaye dans ses collections). De l’abbaye bénédictine Saint-Airy qui se trouvait non loin du canal du même nom est conservé une façade latérale de l’église du 16e siècle, subsistant dans une maison. On peut voir deux fenêtres en arc brisé, une niche, la corniche et un élément de pilastre. Enfin, pour terminer ce tour d’horizon, rappelons que l’hôpital de la ville occupe le site de l’ancienne abbaye Saint-Nicolas.
* Antique Rigueur : réforme instituée dans la suite du concile de Trente dans l’ordre prémontré par Servais de Lairuelz. Les principes de base de la vie monacale sont réintroduits : jeûne, abstinence, mise en commun des biens, etc.
Textes rédigés par Stéphanie Jeanson